Les Mouches Taches...
La petite communauté de Bouzgnards Muto’s avait accueilli à triples bras, les deux héros. Darhn et Zargol étaient venus à la demande du Maistre de la communauté, Yenluk. Ceux-ci avaient besoin d’aide et la récompense était alléchante. De quoi décider le Géant à repartir à l’aventure.
Maistre Yenluk était parti à la recherche d’une aide salvatrice. Le courageux bonhomme, avait même risqué sa vie pour retrouver le grand Darhn, dont tous les faibles connaissaient les exploits.
Sa petite communauté était installée en dehors des chemins plus ou moins sûrs et vivotait de l’extraction de Pierres Noires. La proximité du Gouffre de Lil ‘, n’en fessait pas un lieu parfait, mais c’était le seul endroit où il était supporté par les autres. Avec le temps, Yenluk avait commencé à les aimer, Ses Consanguins.
Malheureusement, il y a quelques cycles, la disparition d’une enfant du village avait bouleversé les quelques familles sous son jou…heu, son aile… Même si c’était chose fréquente dans le monde pourri laissé par les Anciens, que de perdre un membre de sa communauté. Il était de son devoir de protéger ses ouailles. Mais ce n’était que la première, d’autres s’évaporèrent dans la nature hostile, en un nombre grandissant. Huit disparitions en deux cycles et trois autres personnes s’étaient volatilisés le même jour, il y a quelques cycles solaires. Les témoignages de quelques voyageurs de passage, concordaient quant à la réapparition aux abords de la communauté, de quelques-uns des disparus. Tous disaient avoir vu des Zombis étranges rôdant dans les environs.
Les deux membres du Conseil Communautaire avaient ainsi décidé, d’envoyer quémander quelques aides extérieurs. La réunion avait eu lieu dans la salle centrale de Bapome, en présence de ses habitants. Yenluk et sa Meuf Jolanda, discutèrent sur la personne à envoyer, mais aucuns des Bouzgnards n’étaient assez courageux pour quitter l’amas de cabanes rouillées. Le choix de la population se porta donc sur Maistre Yenluk.
Les pas du Bouzgnard en chef, l’avait mené vers une zone coupe-gorge d’Aris. Le Géant n’était jamais difficile à suivre. Il ne se cachait pas, tellement sur de sa force et de sa notoriété. Un vrai Héro pensa Yenluk, qui déambulait dans les rues tortueuses des Bas-fonds d’Aris. Le brouhaha de la ville, lui écorchait les oreilles, tellement habitué au calme de son village. Il avait appris par quelques Citadins, que le Géant se trouvait à la Taverne du Sans-Soif.
Après plusieurs heures de recherche dans les ruelles tortueuses, il déboucha sur une petite place, où se trouvait une demi-dizaine de Mercenaires en armure bariolées, appartenant à une quelconque Baronnie de Yon. Ils bouchaient l’accès à la taverne. Les cris et bruits de luttes, venant de l’intérieure du bâtiment, rassurèrent le Bouzgnard. Il était au bon endroit.
La devanture de tôles et de planches du Bouge, vola en éclats lorsque l’un des Mercenaires traversa le mur et vint s’écraser sur le sol boueux de la rue. Aussitôt, un autre Mek hurla de douleur, tellement fort que la petite troupe recula de quelques pas. On pouvait lire sur leurs visages, une angoisse et une peur naissante. Celui qui semblait être le chef, ordonna à l’un de ses gars, un grand gaillard tremblant, d’entrer dans la bâtisse. Le courageux volontaire fut contraint d’avancer par la pique acérée que tenait l’un de ses camarades contre son dos. Le grognement puissant qui secoua leurs dernières fibres de volonté, donna le top départ à la fuite des Mercenaires. Ils ramassèrent leurs blessés et disparurent de la petite place où souriait Maistre Yenluk. Il enjamba les débris et entra dans la taverne.
Le mobilier était complètement détruit. Seule une table, où se tenait l’Hom recherché par le demandeur d’aide, avait survécu à la tornade Darhnienne. Yenluk se dirigea timidement vers Darhn. La légende était loin du compte. Il était impressionné par la stature du Géant, beaucoup plus massive qu’il ne l’imaginait. Les muscles saillant de ses bras semblaient vouloir déchirer la tenue, faite de cuir, de morceaux de métal et autres trucs inconnus du Bouzgnard. La lourde masse de cheveux attachés ressemblant à de grosses racines noires, la barbe broussailleuse et le teint buriné donnaient à l’ensemble un air terrible qui fit frissonner de peur le pauvre Yenluk.
Il dégluti douloureusement, lorsqu’il reconnut Géraldine, la Hache légendaire posée négligemment contre le mur, à portée de main du Géant qui buvait une pinte, comme si rien n’était arrivé. Le Daron des lieux ne semblait aucunement en colère contre le destructeur. Il ramassait les morceaux de son gagne-misère, sans rechigner, trouvant même le temps de sourire de son malheur.
Darhn riait à pleines dents, visiblement ivre. Il donna une tape dans le dos de l’Hom, quand celui-ci passa près de lui, le faisant reculer de plusieurs pas.
Droit comme un puceau attendant le passage à l’âge de l’Hom, Yenluk se tenait les mains, tortillant le bas de sa tenue de tissu. Darhn leva ses yeux noirs et poussa du pied, ce qui restait d’une chaise en bois, en direction du Bouzgnard timide, et lui fit signe de s’installer. Yenluk n’osait troubler la joie de la victoire émanant du Géant avachi devant lui. Il ouvrit plusieurs fois sa bouche édentée, cherchant les mots à prononcer, tel le pauvre petit Survivant qu’il était, devant l’idole vivante. Prenant son courage en mains, Yenluk déposa son séant sur la chaise branlante et demanda fébrilement :
-Heu, j’aurai…m’enfin, nous… Voilà, on a besoin d’aide…Vous pourriez …
Le Géant, Héro des plus faibles, montagne d’espoir pour la majorité des Bouzgnards, vissa son regard de jais à celui chancelant du Maistre. Il se fit resservir une pinte et grogna trois petits mots d’une voix forte :
-Combien ? Où ? Quoi ?
La conversation dura à peine une demi-heure et les deux belligérants tombèrent d’accord sur un prix.
Darhn lui avait fait acheter, tout un tas de matériel, faisant fondre son budget mais rien ne pouvait gâcher son bonheur. Darhn avait accepté de venir régler le problème qui touchait ses Bouzgnards. Ils se mirent en route le lendemain au petit matin, quittant, Aris et sa population bigarrée. A la sortie de la ville, ils avaient été rejoints par un autre Hom, connaissance du Héro. Un certain Zargol, aussi étrange qu’intéressant. Grand bonhomme vêtu d’un long manteau de fourrure qui n’arrêtait pas de parler, faisant le bonheur de Yenluk. Il l’abreuvait et le comblait du récit des exploits du grand Héro. Darhn parlait peu, toujours sur le qui-vive. Le cigare de Canah visé à la bouche.
Sur le chemin de sa communauté, Yenluk jubilait de contentement. Il suivait tant bien que mal les deux personnages avançant devant lui d’un pas habitué aux dangers certains offerts par les Anciens.
Le trajet ne fut interrompu que par un petit groupe de Carniv. Des Hom’s mangeurs d’autres Hom’s, qui avaient voulus faire ripaille avec les corps des voyageurs. Ils ne comprirent leur erreur que bien trop tard. Yenluk, qui en bon Bouzgnard s’était caché dans ses guêtres, assista enfin à ce qu’il avait entendu dire sur le Géant. Un combat magnifique, une chorégraphie magique, les têtes et autres membres dansaient autour de Darhn. Sa hache tranchait sans résistance tout obstacle se plaçant devant lui. L’autre Survivant, Zargol ne semblait pas en reste lorsqu’il perça de part en part le dernier des agresseurs. Les corps furent jetés hors du campement. Seuls quelques Glouk et autres grognements de mastications, perturbèrent le reste de la nuit.
L’arrivée dans la petite communauté des trois Survivants coïncida, de peu, avec une autre série de disparition. Jolanda, la Meuf de Yenluk ainsi que trois autres membres s’étaient volatilisés. Ils avaient disparu deux cycles lunaires avant le retour des héros. Cependant la joie procurée par la seule présence de Darhn, remis un peu d’espoir dans la triste vie des Bouzgnards survivants.
Darhn entra dans la salle du conseil, un silence respectueux souffla sur l’ensemble de l’assemblée. Il écouta les doléances sans dire un mot, jetant parfois un regard vers Zargol dans une conversation qu’eux seuls comprenaient.
-Je les ai vus M’sieur comme je vous vois. Répéta plusieurs fois un petit Muto borgne de deux yeux sur trois.
-Et moi, j’ai un pote qui, à entendu quelqu’un, qui avait croisé le jeune Michla, disparu depuis un cycle. J’vous jure M’sieur. Commenta une autre personne.
Yenluk compris, après avoir voyagé en compagnie du Géant, que tout cela l’agaçait. Darhn aimait les choses claires et directes. Zargol souriait du spectacle donné par la communauté apeurée et difforme. Le Maistre repris son rôle et imposa le silence en levant les bras. Tous étaient suspendus à ses lèvres quand il dit :
-Silence mes chers amis, comme promis je vous ai ramené le grand héro. Lui et son compagnon, Zargol sont venus nous aider. Laissez nous nous reposer, je vous en prie. La route a été longue et demain est un autre jour de galères. Allez-vous calfeutrer chez vous, mes chers enfants et ne sortez sous aucuns prétextes.
Les Bouzgnards regagnèrent leurs cahutes, laissant Yenluk en compagnie de leurs sauveurs…
A Suivre…